Le projet de loi relatif au contrat de travail pur produit ultralibéral se contente de légaliser la situation actuelle
La modification de la loi sur le contrat de travail ainsi que la réglementation de l’usage des contrats à durée déterminée (et du travail intérimaire) constituent une très ancienne demande de l’Union des Syndicats de Monaco.
Le projet de loi appelé de tous ses vœux par notre organisation aurait dû apporter des réponses concrètes et de progrès aux problèmes soulevés par l’expérience de terrain depuis vingt-cinq ans.
Nous devons malheureusement déplorer l’absence de solutions protectrices et réalistes du texte présenté par le gouvernement qui est sans portée sociale.
Ce seul constat serait un moindre mal.
Il convient hélas de le compléter en regrettant la volonté manifeste de faire entrer dans la loi des dispositions ultralibérales qui entérinent la situation présente et ses graves carences.
Ce projet loin d’être anodin est profondément marqué idéologiquement.
Trois reculs successifs
Le présent projet constitue l’aboutissement d’une démarche gouvernementale marquée par trois étapes :
1) Première étape : octobre 2001 avant projet de loi réglementant l’usage du CDI et du CDD
Ce premier texte, malgré certaines imperfections, est socialement avancé et protecteur. Il fait l’objet d’un avis circonstancié de l’USM favorable à son adoption sous réserve de certaines modifications ou adjonctions.
2) Deuxième étape : février 2004 : projet de loi réglementant le CDI, le CDD et le travail temporaire
Ce texte constitue un net recul social par rapport à l’avant projet de loi de 2001 (pour le CDI et le CDD) et par rapport à la proposition de loi du Conseil National votée en 2000 (pour le travail intérimaire).
L’avis de l’USM fait état de quatre griefs concernant le CDI et de deux griefs fondamentaux concernant le CDD. L’avis de l’USM retient cependant comme positives les dispositions arrêtées pour le CDI et sa rupture. L’USM est favorable à leur adoption.
3) Troisième étape : mars 2007 : nouveau projet de loi sur le CDI et le CDD.
Sous prétexte du passage devant le Conseil d’Etat, le projet de 2004 est profondément remanié. Il est totalement différent de celui qui en 2004 avait été soumis aux organisations professionnelles et au Conseil Economique et Social.
Le texte ne répond plus du tout aux aspirations sociales.
Pire, dans certaines de ses dispositions il constitue une véritable machine de guerre tournée contre les salariés.
Remarques générales
1) Réécriture de l’exposé des motifs
Ce nouvel exposé des motifs particulièrement dogmatique s’attarde sur les avantages dont bénéficieraient les travailleurs dans divers domaines, interprétant à dessein, et bizarrement pour un texte juridique , les sentiments des salariés : « satisfaction » éprouvée à occuper un emploi à Monaco », un « niveau de rémunération », une « assistance familiale performante », la « qualité de l’assurance maladie »… Ce développement surprenant conforme à la réalité sur certains points et contestable sur d’autres passe sous silence le très important turn over de main d’œuvre, correcteur de la force d’attractivité de Monaco, ainsi que le retard endémique de notre droit du travail peu protecteur. A aucun moment l’exposé des motifs ne souligne l’apport des salariés à l’économie monégasque.
L’exposé des motifs marque, en outre, le retour à l’individualisme et aux dispositions générales du Code Civil, omettant de souligner et de renforcer l’intérêt du régime juridique original du contrat de travail qui depuis la libération restreint la portée de l’assujettissement à l’employeur.
2) Le dispositif s’éloigne des principes de notre droit du travail
Conformément à l’exposé des motifs, le texte s’éloigne du souci de protéger le salarié des excès du libéralisme économique, et de celui de limiter le pouvoir de l’employeur dans le rapport de travail caractérisé par une inégalité de fait liée à l’état de subordination du salarié.
Il abandonne toute ambition d’orienter le droit vers la promotion du travailleur, donc le progrès.
Enfin, le texte s’écarte sciemment, notamment dans son dispositif complexe afférent à la rupture du CDI, du principe d’accessibilité du droit pour le salarié.
3) Pas d’avancée sociale
Au lieu de corriger les errements de la jurisprudence dans l’application de l’actuelle loi sur le CDI (motivation du licenciement, indemnité de congédiement) le projet entérine et aggrave la situation actuelle malgré deux améliorations.
Au lieu de codifier l’usage du CDD et de marginaliser la précarité, le texte se contente de moraliser l’utilisation de ce type de contrat en limitant les abus les plus criants et en créant, en quelque sorte, une période d’essai de deux ans préalable au CDI.
Pas d'obligation de motiver le licenciement
L'obligation de motiver : une notion marginalisée
Les salariés et l’Union des Syndicats de Monaco désirent ardemment l’obligation légale de motiver le licenciement. Le patronat s’y oppose.
Hypocritement, il fait état du désir des salariés de ne pas voir figurer le motif dans la lettre de licenciement. Cet argument est particulièrement fallacieux et choquant.
Ce souhait des salariés est si exceptionnel et rare qu’il paraît ridicule de l’évoquer.
Les trop nombreuses victimes de la jurisprudence actuelle et de son usage par le patronat témoignent de l’impérieuse nécessité d’une obligation stricte et sans ambiguïté.
En instaurant (art 16 alinéa 4) une obligation de motiver, à titre supplétif, en l’absence d’accord (cf exposé des motifs) le projet reprend la thèse patronale. Et contrairement à ce qui est prétendu dans l’exposé des motifs il ne s’inspire pas du tout en cela de l’avis voté à l’unanimité par le Conseil Economique et Social en séance plénière du 9 Novembre 2005.
Au lieu de marginaliser (éventuellement ?) la non motivation, il recherche à tout prix la marginalisation de la motivation !
L’idéologie ultralibérale s’exprime ici avec force !
Complexité de la procédure de rupture du CDI
La rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur est l’objet d’une procédure compliquée pour les deux parties.
Quatre articles de loi y sont consacrés (art 15 à 18)
Pour les grandes et moyennes entreprises possédant un service du personnel la procédure imposée nécessitant trois lettres (ou deux lettres et un accord écrit) et un entretien, peut s’envisager. Pour les petites entreprises la complexité du dispositif renforce les contraintes imposées à l’employeur.
Pour le salarié, la complexité du dispositif rend peu accessible et peu compréhensible la procédure. Elle l’expose à des manquements fatals qui ne lui permettront pas d’obtenir éventuellement réparation devant les tribunaux.
La rupture de son contrat de travail (déjà dramatique en soi) devient un parcours du combattant pour initiés se déroulant en terrain miné.
A l'obligation, pour l'employeur, de motiver le licenciement, le projet substitue l'oglibation, pour le salarié, de négocier les modalités de son licenciement
1) La décision du licenciement est le point de départ de la procédure
L’Union des Syndicats de Monaco a toujours exprimé son souhait de prendre pour point de départ de la procédure le projet de licenciement et non la décision du licenciement.
Dans notre esprit l’entretien préalable au licenciement constitue le moment où le salarié (assisté de la personne de son choix) est informé verbalement des motifs du licenciement envisagé et celui où il peut s’expliquer, se défendre, apporter des précisions indispensables avant toute décision irrévocable.
C’est seulement après ce temps accordé à la défense du salarié et un délai de réflexion permettant à l’employeur d’apprécier celle-ci que peut intervenir la décision de donner suite au projet de licenciement.
Or, dans un souci évident de préserver la toute puissance du pouvoir patronal, le projet de loi rejette l’obligation d’un entretien préalable et considère comme acquise la décision de licencier.
2) Négociation des modalités du licenciement : un traquenard pour le salarié (article 16)
L’entretien fixé par le texte de loi est marqué du sceau de la brutalité : il s’ouvre par la remise d’une lettre de licenciement non motivée.
L’assistance pour le salarié d’une personne de son choix n’est pas de droit.
Le texte de loi reste muet sur le fait de savoir si la motivation est donnée verbalement. Autrement dit, cela n’est pas une obligation.
Le salarié et l’employeur disposent alors de quatre jours pour conclure un accord écrit. Cette clause est éminemment dangereuse pour le salarié. Ce dernier peut ignorer l’existence du délai de réflexion. Par ailleurs, sous la pression de l’émotion et de la peur beaucoup de travailleurs seront amenés à examiner la proposition de l’employeur sans consulter un conseil, un avocat, un syndicat, un conjoint, ... et parfois - selon le niveau d’instruction – sans même connaître ni comprendre le contenu de l’accord (dans lequel, en outre, aucun délai de rétractation n’est signifié). Les plus faibles seront très exposés.
Le droit du travail devient une machine à piéger.
3) Ce qui est interdit et condamnable deviendrait légal !
L'instauration de cette disposition légaliserait plusieurs principes aujourd'hui frappés d'interdiction.
a) Connaissance effective du motif : la date
Le premier principe est celui selon lequel une transaction est jugée non valable lorsque le salarié l'a conclue sans avoir eu la connaissance effective du motif du licenciement.
Ainsi, les tribunaux annulent les transactions conclues avant la date de retrait de la lettre de licenciement contenant la motivation écrite et définitive de ce dernier (la date de présentation est reconnue non valable car le salarié n'a pas encore connaissance du motif).
Cette précaution est, bien entendu, d'une extrême nécessité.
Par exemple, un salarié dépressif victime de harcèlement moral ou de toute situation fragilisante pourrait signer sous la pression ou dans la hâte de fuir le contexte à l'origine de ses perturbations psychologiques.
Or, le texte gouvernemental propose de légaliser ce qui est aujourd'hui interdit, la motivation du licenciement étant rendue obligatoire dans le projet uniquement à titre supplétif et après licenciement.
b) Consentement libre et éclairé :
Le second principe est celui de l'interdiction de tout consentement vicié. Pour être reconnue valide par les tribunaux, une transaction doit se réaliser avec consentement libre et éclairé du salarié :
- Elle doit être signée après mûre réfléxion et en connaissance de tous ses droits : le temps de la réflexion, des discussions, d'un véritable dialogue, des consultations, de conseils, ...
- Elle est annulée lorsque le salarié ne lit pas le français et n'a pas pu comprendre la portée de l'accord.
Or, le texte gouvernemental méconnaît cette obligation de sérénité par l'imposition d'une date butoir (avec un délai fort court, de surcroît) et nie toute reconnaissance des droits de l'étranger à la longue, ou de l'analphabète)
4) La notion de licenciement fautif écartée !
La négociation qui s’instaure, après licenciement, peut donc aboutir à toutes sortes de dispositions convenues par les parties. Cependant, le projet est incitatif pour que soit plus particulièrement évoqué, outre la non motivation, l’octroi d’une indemnité égale à celle à laquelle l’employeur serait condamné par le Tribunal si le licenciement était jugé non valable.
Cette clause revient à légaliser la pratique actuelle (unilatérale il est vrai). Elle est immorale car elle tend à gommer la notion de faute de la part de l’employeur et, du même coup, la notion de sanction.
Comme le Tribunal n’est pas autorisé par la loi à condamner l’employeur au versement d’une indemnité supérieure à celle proposée par voie d’accord (article 18 alinéa 2), le salarié qui trouve injuste la non motivation du licenciement prend le risque de perdre, devant la justice, l’indemnité qu’il a refusée dans le souci d’exiger une motivation écrite au nom du respect de sa personne !
5) la complexité cache la tromperie… et se transforme en absurdité !
Au départ du marathon de la rupture du contrat de travail, le salarié a déjà perdu son emploi !
A l’arrivée, s’il passe sans encombre les obstacles, il peut espérer obtenir la motivation du licenciement.
Non !
Car, c’est sans compter avec l’alinéa 1 de l’article 18 qui dispense de l’obligation de motiver contre paiement d’une indemnité (article 18 – alinéa 1) équivalente à celle visée à l’article 16 alinéa 2 refusée par le salarié en vertu de l’alinéa 4 de l’article 16 !
Comble d’immoralité ! … Et comble d’absurdité !
IL N’Y A DONC PAS OBLIGATION DE MOTIVER
Il aura fallu une procédure tarabiscotée et quatre articles de loi pour parvenir à satisfaire législativement une revendication patronale !
En vérité, l’ensemble de la procédure repose sur le postulat non dit selon lequel la rupture unilatérale d’un contrat de travail peut intervenir sans raison fondée pourvu que l’employeur paye une contrepartie. C’est l’abandon d’un fondement essentiel de notre droit et une profonde transformation de la conception originale du contrat de travail.
Amputation drastique des indemnités de rupture du CDI
1) Historique
La rupture du contrat de travail entraîne réparation, dans tous les cas sauf faute grave, grâce à l’octroi d’une indemnité dite de « congédiement ».
La loi n° 845 instituant l’indemnité de congédiement a instauré en 1968 un minimum qui « ne peut être inférieur à celui des indemnités de même nature versées aux salariés dans les mêmes professions, commerces ou industries de la région économique voisine ».
Pendant 30 ans l’application de ce texte s’est logiquement effectuée en prenant pour référence les minima d’indemnités versés dans les mêmes professions de la région économique voisine, ces montants étant fixés par les conventions collectives applicables en France dans les différentes professions.
Cette lecture de la loi était tellement limpide et cette application tellement constante que, par corollaire, les conventions collectives monégasques n’ont pas fixé le montant des indemnités de congédiement pour la plupart. Seule la Convention Collective Nationale dans son avenant n° 18, considéré par les signataires comme la « voiture balai » des accords de mensualisation, a mentionné des indemnités minimales monégasques pour couvrir les éventuels secteurs professionnels non régis par des conventions collectives professionnelles dans le pays voisin.
Malheureusement, la jurisprudence IVALDI / EDIMO (confirmée par le Cour de révision du 26 mars 1998) a vidé la loi de son contenu précisant que l’indemnité doit s’entendre comme visant le minimum légal.
Cette décision a donc eu pour conséquence de priver les salariés d’indemnités de rupture du contrat de travail parfois substantielles.
2) Confirmation du recul social jurisprudentiel
Le projet de loi gouvernemental de 2004 avait corrigé ce recul jurisprudentiel inattendu et rétabli l’application antérieure.
Pour ce faire il avait confirmé le libellé de la loi n° 845 tel que rappelé plus haut en y adjoignant la précision « en vertu de la réglementation ou des conventions collectives ».
Sous prétexte du passage devant le Conseil d’Etat, le texte remanié fait disparaître toute référence à la région économique voisine.
Ce n’est pas, bien entendu, pour créer de meilleures indemnités que celles versées en France !
C’est, au contraire, pour instaurer une indemnité monégasque a minima qui lèse considérablement les salariés.
Ce « déréférencement » à volonté antisociale en dit long sur les intentions présentes et à venir du gouvernement !
Une autre amélioration sociale concernant la rupture du CDI a également disparu par rapport au projet initial
Outre l’obligation de motiver le licenciement dans la lettre de rupture et le correctif concernant le montant de l’indemnité de congédiement, le projet de loi de 2004 avait prévu trois autres améliorations sociales dont la logique paraît évidente :
1) Le doublement de l’indemnité de licenciement pour motif jugé non valable. Cette disposition est maintenue (mais dans quelles conditions !). Elle a, du fait de ces conditoins, une portée modeste.
2) La suppression du dernier alinéa de l’article 2 de la loi n° 845 qui prive de l’indemnité de licenciement le salarié ayant atteint l’âge de perception d’une pension de retraite. Cette indemnité venant sanctionner par décision judiciaire un comportement fautif de l’employeur, la clause actuelle paraît très injuste. Elle introduit en outre une discrimination en vertu de l’âge parfaitement discutable.
Le présent projet a cependant réintroduit à nouveau cette disposition.
3) Le cumul des indemnités de congédiement et de licenciement
Ces deux indemnités sont de nature très différente.
L’indemnité de congédiement constitue une contrepartie au droit de résiliation unilatérale de l’employeur, une réparation de la rupture même du contrat.
L’indemnité de licenciement a vocation à réparer le comportement fautif de l’employeur.
En cas de sanction décidée par le Tribunal, il est donc normal que le salarié conserve aussi l’indemnité de congédiement due au motif de la rupture.
Contrat a durée déterminée : erstz législatif entérinant le principe de la précarité d'emploi
10 articles suffisent au projet pour « boucler » le sort législatif du contractuel.
Quoi d’étonnant puisque l’objet essentiel consiste à donner le change (peut être aux yeux du Conseil de l’Europe) sans toucher à l’essentiel.
La philosophie du projet
Dès l’exposé des motifs la philosophie du projet apparaît de manière éclatante : 15 % de salariés à statut précaire n’est pas une réalité choquante !
Un salarié sur 6 en précarité (le travail à temps partiel non choisi n’est pas pris en compte) : c’est tout à fait admissible (page 7 – 4ème alinéa).
Aussi, n’est-il pas justifié d’assigner au projet le but de combattre ou marginaliser la « précarisation » des emplois.
Aussi, est-il affirmé sans ambages la non « prévalence » du CDI sur le CDD (page 7, 3ème paragraphe).
Pour l’Union des Syndicats de Monaco laisser à l’employeur le libre choix entre le CDI, le CDD (et la mission intérimaire) constitue une option lourde de conséquences sociales.
Le présent projet se contente, en fait, d’instaurer en quelque sorte une période d’essai de 2 ans avant conclusion d’un CDI. Il ne réglemente pas l’usage du CDD.
Une loi qui ambitionnerait de défendre le salarié contre la précarité limiterait l’usage du CDD à un nombre limité de cas de recours (remplacements, surcroît d’activité,…) et affirmerait la prévalence et le souci de protection du CDI (ce qu’envisageait le projet de 2000 pour le CDD). Ce principe a été retenu également par le Conseil National en 2000 dans sa proposition de loi concernant un autre contrat de type précaire : la mission intérimaire.
Mais il est vrai que de bout en bout le texte de loi affiche sa volonté de fragiliser le CDI.
Une amélioration cependant
Si le texte ne reprend pas clairement l’article 23 du précédent projet qui affirmait l’impossibilité pour un CDD de pourvoir un poste permanent, il limite cependant à deux ans la durée du contrat et de son renouvellement. Il oblige également à la requalification en CDI au bout de deux ans dans l’emploi et dans le poste.
Cette précision existant dans l’exposé des motifs et pas dans le texte (qui parle de l’emploi et pas du poste) il faut faire état avec réserve, d’une amélioration. S’il s’agit de l’emploi et du poste, il ne devrait plus y avoir de contractuels à vie. Cette amélioration a été l’objet de luttes pugnaces des salariés depuis 25 ans..
A défaut de réglementer l’usage, le texte moralise l’usage.
Des lacunes
1) Pas d’encadrement de l’usage du CDD
Pour endiguer la montée en puissance de l’utilisation de toutes sortes de contrats, hors CDI, il est impérativement nécessaire :
1 - d’affirmer la primauté du CDI et de garantir l’usage du CDI pour tout poste ou emploi permanent,
2 - de réserver le CDD à des tâches temporaires ou ponctuelles,
3 - de fixer, par voir légale, ces cas limitatifs où il peut être recouru au CDD.
Cette conception a été retenue par l’avant-projet gouvernemental de 2001. Elle a été également adoptée par le Conseil National lui-même en 2000 pour ce qui concerne le travail intérimaire.
En rejetant cette conception le présent projet consacre un recul social fondamental par rapport à ces deux textes.
2) Pas d’indemnité de précarité d’emploi
Le projet de 2004, comme le réclamait l’USM, avait instauré une indemnité de fin de contrat en compensation de la précarité de la situation du salarié. Le présent projet est purement et simplement revenu sur la reconnaissance de ce droit !
3) Pas de limitation du nombre de contrats
Si la durée du contrat et de ses éventuels renouvellements est limitée dans le temps, le nombre de contrats ne l’est pas alors que le projet de 2004 le prévoyait (Par exemple peuvent être envisagés 24 contrats successifs de 1 mois ou 48 contrats successifs de 15 jours).
4) Pas de réelle garantie de l'emploi au bout de deux ans
En l'absence de garde-fou et de droits accordés aux délégués syndicaux, il sera facile pour l'employeur de conclure un CDD inférieur à deux ans (23 mois par exemple), de se séparer du contractuel, de conclure un contrat de 23 ans mois avec un autre salarié ... et ainsi de suite.
Peut être cette possibilité est-elle offerte aux employeurs à la faveur d'une ambiguité rédactionnelle. Mais, le projet n'affirmant pas (comme il le faisait en 2004) que le CDD ne peut avoir pour effet de pourvoir durablement un poste permanent, nous sommes en droit d'en douter.
Ainsi, l'amélioration évoquée plus haut serait en fait ... en trompe l'oeil, ou plus simplement une tromperie.
5) Période d’essai !
Le CDD étant lui même période d’essai avant CDI, sauf dans les cas de remplacement, il est inconcevable d’accepter le principe d’une période d’essai à l’intérieur d’une période d’essai. Et d’autant plus inconcevable que la durée prévue est presque aussi longue que pour un CDI.
6) Pas de garde-fou après licenciement économique
Si ce n’est pas la généralité, le recours au licenciement économique collectif peut servir à « précariser » volontairement l’emploi.
L’employeur embauche alors en CDD sur des postes permanents après licenciement collectif (parfois même il embauche les personnes licenciées).
Le projet ne prend aucune disposition à cet égard.
7) Pas de garantie d’égalité de rémunération avec le CDI
Le principe « à travail égal, salaire égal » devrait aller de soi mais le caractère précaire de l’emploi appelle une protection législative.
Le projet gouvernemental est volontairement peu protecteur (à l’exception de trois clauses) et sans portée sociale. S’agissant d’un texte en préparation depuis dix ans et devant servir de socle à la réformation du droit du travail il manifeste malheureusement l’absence de volonté de sortir le pays des orientations ultralibérales choisies voici 25 ans.